lundi 25 avril 2016

Nous, citoyens, super-politiques ?


Cachez ce politique que je ne saurais voir ! Si dans l'hexagone, l'heure est manifestement au désintérêt ou la crise de confiance vis-à-vis de la politique et des politiques et qu'il est de bon ton de se livrer à du "politique bashing", nombre d'initiatives se proclament à présent "citoyennes" ou "non-partisanes", par opposition aux partis "traditionnels." Pourtant, à partir de quand fait-on de la politique ? Un citoyen engagé n'en fait-il pas ?

Est-ce que ce ne sont pas les citoyens engagés qui font la politique, ont marqué l'histoire et à qui nous devons les plus grandes avancées sociales ?  Après tout, qu'est-ce qu'un homme politique, si ce n'est pas un citoyen engagé ?
N'est-ce pas une forme d'hypocrisie que de nier faire de la politique comme s'il s'agissait s'un gros mot ?

En France, il existe même un parti politique " Nous citoyens" qui se déclare donc citoyen et "non partisan" ... Ce "parti non-partisan" se présente ainsi : "Nous citoyens sommes un groupe de femmes et d’hommes, artisans, artistes, agriculteurs, avocats, cadres, chefs d’entreprise, commerçants, fonctionnaires, médecins, salariés, sportifs, travailleurs sociaux, retraités, responsables d’association" ... Or, est-ce que n'importe quel parti politique n'est pas un "groupe de femmes et d'hommes, artisans, artistes" etc etc ?
De toute manière, que des groupes politiques s'auto-proclament "mouvement citoyen" n'est pas nouveau, déjà dans les années 90, rappelez-vous du parti créé par Jean-Pierre Chevènement, le MDC, "mouvement des citoyens"...
Depuis, les "mouvements citoyens", "partis citoyens", "associations citoyennes" bourgeonnent sous l'effet de mode et cachent mal la réalité de groupes qui n'ont en général rien de bien nouveau et qui se collent cette étiquette comme on colle à tout va le label "équitable", "bio" ou "responsable" sur les produits en grande surface.

Les nouveaux convertis aux "mouvements citoyens" idolâtres habituellement des modèles en Europe ou dans le monde, dont ils ambitionnent de connaître la même destiné, comme c'est le cas en Espagne ou en Grêce.
Que l'on me démontre que Syriza ou Podemos ne sont pas des partis politiques. Que l'on me prouve que Alexis Tsipras ou Pablo Iglesias ne sont pas des hommes politiques. Ils le sont bien évidement, classés à gauche et membres de groupes de gauche par exemple au parlement européen.

Je ne me suis jamais reconnu dans cette mode "citoyenne" assez démagogique, entretenue souvent par celles et ceux qui n'ont pas réussi à convaincre les électeurs par la voix des urnes dans leur parti et qui décident de se proclamer "citoyens", tout en se mettant à décrier la politique et les politiques, alors qu'ils en sont.
En effet, il n'est pas rare que celles et ceux qui se proclament comme des citoyens engagés "non partisans" ou "au-delà des partis politiques", ont souvent eu un parcours précédemment dans des partis politiques "traditionnels" dans lesquels leur entreprise n'a pas été fructueuse, parfois un long parcours, avec des mandats et des responsabilités.
Quand on n'a pas réussi à accéder au pouvoir dans son parti, il est à présent fréquent qu'on se découvre subitement "au dessus des partis politiques."
Au niveau national, Nicolas Hulot a essuyé un échec à l'investiture d'Europe Ecologie Les Verts à la présidentielle et se pose à présent la question d'y aller en tant que citoyen. Rama Yade qui a essuyé un échec à la présidence du Parti radical, se déclare maintenant candidate "indépendante des grands partis" et prône "une révolution citoyenne". Enfin, Emmanuel Macron qui n'a encore jamais gagné un seul mandat électoral puisqu'il ne s'est jamais présenté à une élection, vient de lancer lors d'une "rencontre citoyenne", un "mouvement politique et citoyen" transpartisan.
Localement, à l'approche des élections, combien de candidats se déclarent aujourd'hui "du mouvement citoyen", "en dehors des partis", bien souvent après qu'ils aient milité pendant des années dans un grand parti. Que doit-on penser alors de celles et ceux, souvent de gauche, qui faute d'avoir réussi dans leur parti, décident de se convertir aux mouvements citoyens ... ?

Même si cela vaut à présent un procès en "archaïsme", je suis convaincu qu'être de droite veut dire quelque chose, être de gauche signifie quelque chose également, il y a derrière ses positions des valeurs différentes et une politique différente.
Lors de la campagne présidentielle de 2007, François Bayrou c'était fait le messager de ce nouveau dogme qu'être de droite ou de gauche était dépassée et qu'il fallait aller au-delà de ces clivages pour travailler avec les gens compétents qu'ils soient de gauche ou de droite.
Admettons que cette idée n'a pas beaucoup fait avancé notre pays, ni François Bayrou, mais qu'elle a surtout permis à des hommes et des femmes politiques de passer sans complexe de gauche à droite, comme des "ministres d'ouvertures" au tableau de chasse de la Sarkozy. Merci Eric Besson, Fadela Amara, Bernard Kouchner etc. ...

Je pense au contraire qu'il faut être clair sur ses positions et fier de ses valeurs.
Je pense que les citoyens engagés et les candidats qui se disent apolitiques ne dupent personne.
Si les Français se détournent de la politique, je pense que c'est d'une part à cause de ses échecs à réduire le chômage surtout et aux ambiguïtés, aux contradictions, au manque de clarté et notamment par ce que la gauche ne semble plus représenter et défendre les personnes pour qui elle doit se battre.

Alors, si les initiatives dites "citoyennes", ont le mérite de permettre à des gens qui ne souhaitent pas rejoindre ou ne se reconnaissaient pas dans les partis politiques traditionnels, de participer à la vie politique c'est bien sûr une bonne chose, mais gare aux charlatans et convertis par intérêt qui pensent davantage à la récupération politique et aux bénéfices qu'ils pourraient en faire.


1 commentaire: