Dans un entretien au journal Le Monde, du 18 novembre 2017, l’ancien
Président Brésilien (de 2003 à 2011), Luiz Inacio Lula DA SILVA ne cache pas son
ambition de revenir sur le devant de la scène et se présenter aux élections présidentielles
d’octobre 2018.
Dans un pays, 9ème puissance mondiale, fort de 206 millions d’habitants,
éprouvé et fragilisé par une situation politique particulièrement tumultueuse
depuis son passage de témoin à Dilma ROUSSEFF, il garde auprès des brésiliens un fort capital sympathie et est favori
des sondages. Mais à 72 ans, le retour de Lula est un pari risqué face
à une situation économique, sociale et politique qui s’est dégradée et face
surtout aux défis auxquels est confronté le pays, l’un des plus
inégalitaires du monde, l’un des plus endetté aussi (près de 90% de son PIB).
Atypique, attachant, passionné, l’homme
incarne pour beaucoup une personnalité exemplaire, armé d’un charisme indéniable et d’une
persévérance à toutes épreuve. Cette image quasi iconique devenu la fierté d’un
pays, plébiscitée en 2011 par 80% d’opinions positives, s’est également rapidement
imposée sur la scène internationale.
Lula, c’est l’envergure d’un « leader
tiers-mondiste », l’incarnation d’un homme du peuple à la tête d'un « pays du Sud », c’est le Président-ouvrier
issu d’un milieu très modeste, que rappelle ostensiblement sa main gauche
amputée d’un doigt arraché par une machine en usine. Lula, c’est l’enfant de 10
ans, petit cireur de chaussure dans les rues de Santos, qui a grimpé un à un
les échelons jusqu’à devenir le Président de l’une des plus grandes puissances
mondiales.
Enfin, Lula c’est surtout, le
symbole d’une politique qui donne la priorité à la lutte contre la pauvreté,
avec des résultats concrets. Au cours de l’ère Lula, l’extrême pauvreté au
Brésil est passée de 17,5% à 10,5% de la population entre 2003 et 2008, le chômage
est tombé de 12% à 8% entre 2002 et 2008, le salaire minimum a été significativement
augmenté, des campagnes de lutte contre la malnutrition et l’exclusion ont été
menées, un soutien financier a été apporté aux personnes âgées précaires et des
allocations familiales ont été créées pour encourager la scolarisation des
enfants.
Depuis cette époque, les choses
ont bien changé. Lula peut certes, se féliciter d’avoir passé le flambeau à Dilma ROUSSEFF, sa
protégée, en 2011, alors qu’il était touché par la limitation du nombre de mandat,
mais celle-ci n’a été réélue que de justesse en 2014 et surtout, a été destituée
en 2016, une première dans l’histoire du pays.
C’est un vaste scandale lié à une
enquête anticorruption qui aura fait tomber la Présidente et de nombreuses
personnalités politiques aux premiers rangs desquels Lula qui écope d’une condamnation de neuf ans de prison en juillet 2017 et dont il a fait appel. Ce
dernier a été reconnu coupable d’avoir accepté plus d’un million d’euros, dont
un appartement, en remerciement de son intervention pour l’attribution de
contrats avec la compagnie pétrolière Petrobras. Lui, se dit victime d’une
chasse aux sorcières, dénonce une manœuvre pour l’écarter de la course à la présidentielle
et nie les accusations qu’il met sur le compte « des mensonges de la
police fédérale, de la mégalomanie des procureurs et d’un juge otage des médias. »
Aujourd’hui l’ex-chef d’État, malgré
une image écornée, jouit toujours d’une certaine popularité tant nationale qu’internationale
et même si c’est peut-être un peu par nostalgie que les Brésiliens aspirent à
retrouver leur champion, le défi est grand. Alors qu’il s’était chuchoté en
2010 qu’il aurait pu briguer le poste de Secrétaire général des Nations-Unies
pour succéder à Ban KI-MOON, le voilà prêt à redescendre dans l’arène « pour
aider les plus pauvres » comme il le dit lui-même.
L’élection présidentielle est fixée
aux 7 et 28 octobre 2018.
D’ici là, Lula devra se débattre
avec la justice de son pays, mais l’ancien Président en a vu d’autres, ces
dernières années ne l’ont pas épargné. En 2011-2012, il a vaincu un cancer. En 2016,
il a été nommé Ministre par Dilma ROUSSEFF, décision qui a été immédiatement
annulée suite à une vague de protestation et des manifestations dénonçant une manœuvre
pour permettre à l’ex-Chef d’État d’échapper à la justice.
Depuis 2011 le monde a changé, la
situation nationale et internationale ont changé.
A Washington, Donald TRUMP ne
sera peut-être pas aussi amical que l’était Barack OBAMA. En Amérique latine, depuis
2011 presque tout les chefs d’État ont changé, c’est le cas en Argentine, au Venezuela,
en Uruguay, au Costa Rica, à Cuba, en Équateur, au Guatemala, au Honduras, au Mexique,
au Paraguay, au Pérou, en République Dominicaine, au Salvador …
Depuis 2011, même le Pape a
changé …
Enfin, si l’économie brésilienne semble
repartir après deux années de récession, particulièrement éprouvantes pour les
finances du pays, la situation politique elle, est dramatique.
Après sa décision de privatiser plusieurs
entreprises publiques, de supprimer les « pharmacies populaires » créées par Lula
pour permettre aux plus défavorisés de se procurer des médicaments à bas prix
et d’annuler des lois sur la lutte contre la déforestation et sur la protection
des territoires des indigènes, la popularité du nouveau président intérimaire,
Michel TEMER, est au plus bas.
En outre, celui-ci est actuellement visé par de
graves accusations de corruption et pourrait à son tour être destitué avant la
fin de son mandat ...
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