lundi 15 avril 2013

Sacs attacks : géopolitique du sac plastique


Idée astucieuse pour réinventer l'usage du sac plastique de ce juif ultra-orthodoxe soucieux de se préserver (Reddit -11/04/13)
Symbole de la société de consommation, comme le fast-food l’est à la malbouffe, le sac plastique, ce pratique sachet de plastique et donc d'origine pétrolière, s’est progressivement substitué au cours des années 1960 aux paniers en osiers, sacs en papiers et cabas, pour se répandre partout où l’homme se trouve et même au-delà.


Apparu aux Etats-Unis, en 1957, d’abord sans poignée puis tel que nous le connaissons aujourd’hui à partir du début des années 1960 sous la forme du « sac à bretelle », cet objet du quotidien voit sa production exploser dans les années 1970 pour devenir le symbole de l’ère du jetable.

A 1 centime d'euro pièce, il a une durée d'utilisation de quelques minutes, mais une durée de vie potentiellement de plusieurs siècles.
Les français utilisent en moyenne 300 sacs plastiques chaque année. Certes, c’est beaucoup, mais cela est pourtant sans communes mesures par rapport à il y a quelques années.
Pourquoi ? Simplement, parce que la majorité des grandes enseignes n’en distribuent plus gratuitement.
Après des décennies de générosité, qui ont entrainé une addiction des consommateurs à l’usage de sacs plastiques, afin de réaliser des économies mais prétextant une lutte contre la pollution et en faveur du respect de l’environnement, les commerçants ont progressivement, les uns après les autres, stoppés la distribution gratuite de sacs.

Cette évolution n’est pas spécifique à la France, ni à l’occident et on constate ce même processus un peu partout dans le monde. Les raisons de son essor et de sa résorption sont identiques aux Etats-Unis, en Allemagne, en Mauritanie ou en Chine.
C’est au Danemark en 1994 que les premiers sacs à usage unique ont été taxés. En 2002, les irlandais ont réduit de 90% leur consommation de sacs de caisse après l’adoption d’une taxe de 15 centimes par sac en caisse. En France, la fin de leur gratuité dans la plupart des enseignes a fait passer leur consommation de 15 milliards d'unités en 2003 à environ 800 millions en 2010.

Le sac plastique contribue à l’épuisement des réserves naturelles de pétrole, source d’énergie fossile,  donc non renouvelable, que la nature a mis des millions d’années à créer.
Légers donc s’envolant facilement, ils représentent un véritable désastre environnemental.
Ils sont absolument partout. Plages, forêts, déserts et montagnes … D’après l’Ifremer, 122 millions de sacs plastiques jonchent les 5 000 kilomètres de côtes françaises.
Outre ses désagréments esthétiques, les sacs plastiques causent chaque année la mort de plus de 100 000 animaux marins. A lui seul, le plastique représente 60 à 80 % des déchets en mer.
On estime que la Méditerranée contient 250 milliards de particules plastiques représentant un poids de 500 tonnes qui flottent à la surface. Cette situation n’est pas propre à la méditerranée, on parle même de l’existence de "continents plastiques" qui représente un véritable fléaux écologique à l’encontre de la faune aquatique.

Pour remédier à cette situation, il y a plus radical encore que le choix des grandes surfaces de rendre les sacs payant. Certains pays ont tout simplement décidé de les interdire.
A Haïti, c’est en octobre 2012 que le Premier ministre avait annoncé l’interdiction des sacs en plastique et des emballages en polystyrène sur tout le territoire, afin de protéger le littoral et les mangroves.
Depuis janvier 2013, c’est également le cas par exemple du Mali et de la Mauritanie. Pour cette dernière, les autorités n’ont pas fait les choses à moitié, pour quiconque ne respectera pas cette interdiction, il est prévu des peines de prison fermes pouvant aller jusqu’à un an et une amende d’un million d’ouguiyas (2.500 euros).
La Mauritanie est loin d’être le seul pays africain à avoir prix une telle mesure, le continent est d’ailleurs le plus répressif. Depuis plusieurs années, l’Afrique du sud, le Rwanda, l’Érythrée, l’Ouganda, la Tanzanie, le Gabon, et le Kenya mènent une lutte sans merci contre les sacs plastiques. L’Asie n’est pas en reste, puisque depuis 2008, tous les magasins de Chine vendent leurs sacs plastiques. On estime que les chinois utilisent 3 milliards de sacs de plastique à chaque jour.

Vent debout face à cette situation, le syndicat européen des producteurs de plastique met en avant, sur son site internet (www.plasticseurope.fr) le poids et les enjeux économiques de l’industrie du plastique :
« l'industrie des matières plastiques européenne est la principale industrie contribuant à l'économie européenne. Elle emploie directement quelque 1,6 millions de personnes, auxquelles il faut ajouter bon nombre d'emplois indirects.  Ensemble, ces différents acteurs de l'industrie plastique ont par ailleurs apporté quelque 13 milliards d’euros d'excédent commercial dans l'économie des 27 pays de l’UE, ce qui a permis de réduire d’autant le déficit de l’ensemble de l’industrie pour 2008 (dépassant 240 milliards d’euros). » (PlasticsEurope 2013).

Outre l’importance du secteur plastique en termes d’emplois et d’industrie, le lobby du plastique dénonce sur son site internet :
 « Les plastiques sont au cœur de notre société technologique et ils facilitent la vie de tout un chacun dans les pays développés. Mais que se passerait-il si cette substance «magique » disparaissait ? A quel point sommes-nous dépendants des plastiques et que se passerait-il si ces produits si communs (et si communément accusés de mille maux) disparaissaient ? De combien d’années cela ferait-il reculer notre société ? » (PlasticsEurope 2009).

Pour PlasticsEurope, la réponse n’est surement pas l’interdiction, mais passe plutôt par la collecte et le recyclage des déchets. Pas très convainquant aux vues des filières de recyclage artisanales de la plupart des pays en développement.
Quoi qu’il en soit, le travail du syndicat du plastique est plutôt payant puisqu’à ce jour, l’Union européenne n’a jamais été jusqu’à l’interdiction ou la taxation des sacs plastiques.

Industriels et écologistes se mènent donc une guerre aux dimensions internationales pour ou contre un sachet plastique de quelques grammes, dont dépend d’un côté des millions d’emplois et de l’autre autant d’animaux marins. 

 
Création de Pascale Marthine Tayou, "Plastic Bags", est une œuvre d’art contemporaine en gare de Paris Saint-Lazare (Paris) qui sollicite la participation de tous volontaires, voyageurs, agents, pour nouer un à un sur un filet 25 000 sacs plastiques. L'opération se veut-être une réflexion sur l’impact de notre consommation individuelle sur le monde, en y représentant son symbole, le sac plastique.

 
Dans 80% des bovins abattus dans les abattoirs de Nouakchott, la capitale mauritanienne, on décèle la présence de sacs en plastique et le les sacs représentent 25% de la totalité des déchets rejetée par les habitants de Nouakchott. Mais ça c'était avant. Avant que le gouvernement n'interdise purement et simplement les sacs plastiques en janvier 2013.

Fondée par l'environnementaliste Jane Goodall, l’association Roots & Shoots lutte contre la pollution. Cette opération met à contribution  les étudiants chinois pour collecter de nombreux sacs plastique afin d’en faire une oeuvre d’art avec un message fort : gâchez des sacs plastiques et ils reviendront vous hanter.
 
Un paysan traverse une forêt de sacs plastique usés à Toksun dans la région autonome ouïgoure du Xinjiang. [China Daily]
 

3 commentaires:

  1. Salut, j'ai lu avec grand intérêt ton article, je suis bénévole pour l'association Surfrider Foundation Europe qui mène une campagne de collecte de signatures citoyennes pour demander à l'Union européenne l'interdiction des sacs plastiques à usage unique. Je laisse le lien pour signer si cela intéresse certains lecteurs de ton blog: http://initiativesoceanes.org/agissez/
    Merci pour cet article très intéressant!

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  2. Bonjour,

    Nous avons rédigé différents articles sur notre blog sur la problématique des sacs biodégradables et compostables versus les sacs oxo (bio) dégradables qui se développent en Afrique.
    Nous venons de republier un texte à un candide au pays du plastique au Togo, client d'un fabricant d'adjuvants aux plastiques traditionnels.
    Il faut savoir que la pollution par les plastiques est un problème bien plus important en Afrique qu'en Europe, en raison de l'absence d'une gestion rationnelle et régulière des déchets.
    En Afrique, le passage des sacs plastiques aux sacs biodégradables et compostables (sans passer par la case oxo (bio) dégradable) est donc une nécessité absolue.
    La première étape se met en place dans la majeure partie des pays : celle de l'interdiction pure et simple des sacs plastiques en PE.
    Et les fabricants d'adjuvants Oxo sont bien entendu à l'affut pour proposer leur procédé miraculeux.
    http://h2ogabon.blogspot.fr/2013/06/droit-de-reponse-monsieur-donald-sodji.html

    h2ogabon@yahoo.fr
    www.h2ogabon.blogspot.com

    H2o Gabon est une ONG pour la protection de la Nature et de l'Environnement.
    Nous sommes présents au Gabon, Congo, Cameroun, Mauritanie.

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  3. Quelqu’un connaît-il une entreprise de fabrication de pièces en plastique en Espagne ou en France?

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