vendredi 22 novembre 2013

T’es africain et tu regardes pas Big brother Africa ? Non mais tchip quoi !

La nigériane Karen Igho, gagnante de la saison 6 de Big Brother Africa
A l’heure de la 4G, des écrans plats, des réseaux sociaux et du tout numérique, près de 600 millions d’africains, soit environ 55% de la population du continent, principalement les ruraux, n’ont même pas accès à l’électricité.
Bien que l’électrification progresse petit à petit aux rythmes des fêtes de villages d’un autre âge célébrant l’arrivée du courant, force est de constater, comme je l’avais remarqué il y a quelques années au Niger, dans le cadre d’une étude sur l’accès à l’électricité en Afrique Sub-saharienne, que pour la majorité des ménages africains, le premier bienfait qu’offre l’électricité, c’est la télévision.

Pour s’informer, pour distraire les enfants ou pour passer le temps … la télévision fait office de véritable totem du progrès et de la modernité accessible dans chaque foyer. Elle est la petite lucarne qui permet d’entrevoir la société moderne, consumériste et jouisseuse.

Son pouvoir hypnotique n’est plus à démontrer. Les migrants clandestins qui prennent chaque jour la route au risque de leur vie pour rejoindre le rêve « vu à la télé » en sont l’une des démonstrations.
De même, l’opération séduction menée par le gouvernement chinois, en lançant une chaîne de télévision Sino-africaine CCTV Africa, prouve également l’enjeu stratégique de ce qui est sans contestes un outil exceptionnel de propagande et d’influence culturelle et économique.

Toutefois, la révolution du petit écran n’a pas la même intensité sur l’ensemble du continent. Si certains pays font figurent de leaders dans le domaine, à l’instar du Rwanda, du Nigéria, de l’Afrique du Sud et des pays du Maghreb, la production audiovisuelle dans d’autres pays est loin d’être au même niveau.

Alors qu’ostensiblement, antennes et paraboles fleurissent partout sur les murs des villes africaines et se font le principal relais de l’occidentalisation véhiculée par les séries américaines ou les télénovelas, d’autres programmes font le pari du « Made in Africa ». C’est le cas des productions Nollywoodiennes qui remportent un vifs succès dans les pays anglophones et c’est aussi celui plus ambiguë des émissions de téléréalité africaines

Face à un concept télé qui remporte un énorme succès dans les pays occidentaux, l’Afrique pouvait-elle restée sur le bord du chemin ? Faut-il s’en réjouir, mais quoi qu’il en soit, dans ce domaine le continent n’est pas en reste.
Il existe de nombreux programmes de téléréalité produits en Afrique, notamment dans les pays du Maghreb où l’on retrouve d’ailleurs les mêmes titres que sur les chaînes européennes. Néanmoins, en termes d’audimat, depuis huit ans, l’émission de téléréalité phare sur le continent c’est Big Brother Africa.

Produit par Endemol Afrique du Sud, elle bat des records d’audimat avec des dizaines de millions de téléspectateurs.
A Johannesburg, en Afrique du Sud, 28 candidats originaires de 14 pays différents (Ouganda, Kenya, Tanzanie, Malawi, Zambie, Zimbabwe, Ghana, Nigeria, Ethiopie, Angola, Botswana, Namibie, Mozambique, Libéria et Sierra Leone) sont enfermés durant trois mois dans une maison truffée de dizaines de caméras. A la clé, 300.000 dollars et une belle notoriété, comme ailleurs en somme, le côté transnational en plus (pourrait-on l’imaginer en Europe ?).

A l’image de leurs homologues européens, les candidats de Big Brother Africa sont jeunes, beaux et futiles. Ils partagent tous la même langue, l’anglais et assez fréquemment les mêmes sécrétions corporelles.
Comme en occident, c’est un peu la liberté de ton, mêlé au voyeurisme et  à beaucoup de vulgarité qui a fait le succès du programme. En clair, l’émission repose sur un savant mélange de nombreuses scènes « chaudes » et non floutées entrecoupées de périodes d’ennui ou de coma cérébral collectif.
Comme en occident, ce sont de véritables vedettes dans leurs pays et la plantureuse nigérianne Karen, gagnante de la saison sept n’a rien à envier aux françaises Loana et Nabilla, même plastique, même frivolité exhibée devant les caméras.

Pour conclure par une petite anecdote, en 2011 l’émission avait provoqué une vive polémique, en particulier au Zimbabwé.
En effet, le candidat zimbabwéen Wendall Parson, après avoir été largement décrié par les médias parce qu’il est blanc, avait ensuite été porté au rang de héros national par les autorités et par le Président Robert Mugabé himself parce qu’il était le premier zimbabwéen à remporter l’émission. Cette victoire lui avait valu, en plus des 200.000 dollars de gain, un bonus de 50.000 dollars offert par le Président, grâce aux dons de chefs d’entreprise.

Alors finalement, Big Brother Africa est-il aux médias ce que le Monument de la renaissance africaine de Dakar est à l’architecture, le symbole d’un Panafricanisme moderne et décomplexé ou au contraire une aberration, indécente, fruit d’une fuite en avant acculturatrice ?

La gagnante de Big Brother Africa 2013 Dillish Mathews en compagnie du présentateur star nigérian Ik Osakioduwa

Le "shower hour", heure à laquelle les candidats se retrouvent dans leur plus simple appareil pour la douche ou le bain, comme ici la ghanéenne Confidence.

Le candidat zimbabwéen Wendall Parson félicité par le Président Robert Mugabé

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